Soir bleu
Un soir bleu, ponts et Seine gelés, figés dans la fraîcheur d'une nuit qui attend le signal du vent et reste en suspend au-dessus des toits. La Tour Eiffel se joue des reflets gris d'un ciel aussi mouvant que le fleuve qui coule à ses pieds. Les bateaux se cachent sous un voile lavande, somnolant paisiblement, tandis que les premiers éclats de voix des voyageurs du soir ricochent sur leurs coques comme des poignées de cailloux jetées par des enfants turbulents.
Un soir bleu pour avaler l’automne, la laver de ses rouges flamboyants et de ses bruns frissonnants.
Un soir bleu me donne envie
de châtaignes bouillies,
de tartes aux mûres,
de pommes piquées, un peu fripées,
de noix et de noisettes encore vertes, craquantes,
d’herbe coupée, enivrante et parfumée.
Un soir bleu pour gommer le quadrillage des villes et faire pousser des chênes au milieu des chaussées. Un soir bleu pour se réconcilier avec les étoiles qui sont toutes persuadées qu’on les a oubliées.
Je voudrais donner de la couleur à mes mots.